Culture et exploitation du lin à Rumaucourt

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Jusqu'au début du XXe siècle, Rumaucourt a vécu grâce à la culture du lin.

Dans sa thèse de doctorat, L'industrie textile au temps du second empire (Paris, 1956), Claude Fohlen précise :

« Chaque métier peut fournir un salaire journalier de 3 à 4 francs et le chômage n'existe pas (…). 1500 à 2000 métiers à tisser sont disséminés, spécialement dans les communes de Graincourt, Bourlon, Lagnicourt, Quéant, Pronville, Buissy, Inchy, Sains. Ces métiers battent pour le compte des fabricants de Rouen, Le Cateau, Cambrai. Des facteurs de fabriques établis dans le canton, distribuent les matières premières aux tisseurs, reçoivent le travail et en paient façon ; dans d’autres localités, telles que Rumaucourt, Palluel, Écourt, le rouissage et la fabrication du lin emploient tous les gens pendant 8 à 9 mois. »

Le lin est une plante dont on utilise toutes les parties (l'écorce pour le textile, la graine pour les huiles ou la nourriture animale). Semé au printemps, fin mars ou début avril, le lin est récolté trois mois après. Une fois récoltée, elle subit un traitement complexe et de nombreuses manipulations qui emploient une importante main d'œuvre, aussi bien masculine que féminine. Lorsque la plante est arrivée à maturité, on procède à l'arrachage, puis à la mise en carpettes et enfin à la construction de meules. Ensuite, le lin est ramené aux bâtiments d'exploitation ou l'on pratique sur une aire propre et plane, le battage (à l'aide de battes ou de fléaux) qui sépare les graines des tiges. On passe alors au rouissage qui permet la séparation de l'écorce filamenteuse d'avec la tige de la plante. À l'époque, le rouissage se pratiquait par immersion plus ou moins prolongée.

Le rouissage à Rumaucourt Le rouissage à Rumaucourt

À Rumaucourt, le lin se rouissait du côté de la fontaine qui offrait alors une bonne surface d'eaux claires et non stagnantes (ce qui n'est plus le cas de nos jours). Cette activité suivait un règlement élaboré par le conseil municipal,

« Le 21 juillet 1827

Le conseil municipal réunit ce jour sur convocation du maire, après avoir examiné la demande de M. le sous-préfet pour une délibération sur la mise en rouissage du lin, délibère ce qui suit :

Qu'il sera libre à toutes personnes habitants ou forains de faire rouire dans les eaux communales de la communes (sic) de Rumaucourt sous les clauses et conditions suivantes :

1- Il sera ouvert à la mairie dudit Rumaucourt un registre destiné à inscrire les noms des personnes et quantités de lin qu’ils voudront faire rouir dans les eaux communales de Rumaucourt.

2- Le sieur Bize Léopold, régisseur de la tourbière de cette commune sera chargé de compter les bottes de lin mises au rouissage et de tenir les noms des propriétaires et du nombre de bottes qui auront été mises au rouissage et de les remettre chaque jour à la mairie afin de nous mettre en mesure de connaître si les déclarations ont été exactes.

3- Le sieur Bize doit faire placer les lins de la manière suivantes : les lins appartenant aux domiciliés de cette commune seront placé dans la partie située au midi jusqu'à la portion destinée à l'étente des tourbes de Jean-Pierre Demarez du côté du levant et au milieu jusqu'à la portion de Philippe Fournier, et les lins apportés des forains seront placés depuis les deux portions susdites jusqu'à l'extrémité des eaux vers le nord.

4- Les forains qui conduiront des lins au rouissage seront tenus de suivre les chemins usités pour y arriver sans pouvoir pratique aucun chemin tant dans les terres labourées que dans les herbes et éteules.

5- Les forains qui conduiront leurs lins au rouissage dans les eaux de cette commune seront tenus de les mettre en étente hors du territoire de cette commune.

6- Il sera perçu une somme de quarante-cinq centimes par cent de bottes de lin appartenant aux domiciliés de cette commune.

7- Il sera perçu une somme de six francs par cent de bottes de lin bruts mises en rouissage appartenant à des forains.

8- Il sera perçu outre le prix principal trois centimes par franc pour droit de ruelle et cinq centimes aussi par franc tant par les domiciliés que par les forains pour frais de bureau et d'inspection.

9- Tout domicilié en cette commune qui aurait acheté des lins sur l'étranger et les revendant au sortir du rouissage sans être fabriqués, sera tenu d'en payer les droits comme s'ils avaient été mis au rouissage par un forain et dans le cas ou ce dernier serait insolvable, la commune aurait son recours contre celui à qui l'aurait acheté ce domicilié.

10- Tout individu, tant forain que domicilié, qui se permettrait de mettre les lins au rouissage sans en avoir fait la déclaration sera considéré comme voulant frauder les droits de la commune et traité par-devant le tribunal de simple police pour s'y voir condamner tant à payer les droits à la commune qu'à un amende.

11- Nul ne pourra conduire des lins au rouissage ou les en retirer avant le lever ou après le coucher du soleil.

12- Au premier octobre prochain, il sera tenu un rôle de toutes les sommes dues à la commune au cours du trimestre qui sera soumis à l'approbation de M. le préfet pour être exécutoire et ensuite remis au receveur de cette commune qui sera chargé d'en faire recette. Il en sera de même pour l'avenir, savoir pour les lins mis au rouissage aux mois de juillet, août et septembre, le rôle en sera dressé au 1er octobre de chaque année. »

Sources

Notice rédigée d'après l'ouvrage d'André Silvain, Carnet d'histoires de Rumaucourt, 2014, pages 35-40. Publiée ici avec l’autorisation de l'auteur.