Théodore Ducrocq (1889-1916)

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Théodore Ducrocq
Portrait en médaillon de Théodore Ducrocq

État civil

Théodore Séraphin Ducrocq est né le 27 septembre 1889 à Brêmes, fils de Théodore Ducrocq et de Marie Roger ; frère de Louis Ducrocq. Il était cultivateur.

Parcours militaire

Classe 1909, matricule 1225 au recrutement de Saint-Omer. Soldat de 2è classe au 33e RI. Mort pour la France le 2 mars 1916 à Douaumont (Meuse), disparu au combat. Jugement rendu par le Tribunal de Saint-Omer le 12 novembre 1920, acte de décès transcrit à Zouafques le 16 décembre 1920.

Enfance à Brêmes-lès-Ardres et Zouafques

Théodore Séraphin dit Séraphin est né le 27 septembre 1889 à Brêmes-lès-Ardres. Ses parents Théodore DUCROCQ et Marie ROGER s’étaient mariées à Nielles-les-Ardres le 15 mars 1882. Son père natif de Nordausques était garçon de charrue et il avait été marié une première fois avec une fille de Polincove Marie Charlotte Valentine MANIER décédée à 27 ans de laquelle il a eu deux filles qui étaient donc des demi-sœurs [1]. Quand il se remarie avec Marie ROGER, découpeuse de tulles son père a déjà 33 ans alors que sa jeune épouse n’en a que 20 . Elle était née à Salbris (Loir et Cher) le 20 novembre 1862 mais sa mère était native de Nielles-les-Ardres et elle était sans doute partie dans le Loir et Cher comme domestique et y avait rencontré un garçon du cru Isidore ROGER avec lequel elle s'était mariée et fondé une famille. Enfant posthume Marie Roger reviendra à Nielles-lès-Ardres avec sa mère et ses sœurs Nathalie et Désirée quelques mois après le décès de leur père . Sa mère s’y remariera avec Joseph Braure. Théodore Séraphin était le 4ème de sa fratrie [2], son frère ainé Louis né à Nielles les Ardres est décédé mort pour la France pratiquement un an avant lui le 14 mars 1915. Sa sœur aînée Louise est née à Brêmes-lès-Ardres en 1885, Aline au même endroit en 1887 . Ses sœurs cadettes Berthe et Léa sont nées respectivement à Brêmes en 1891 et Zouafques en 1893 . Il n’a que 3 ans quand il arrive à Zouafques en 1891. Après avoir été garçon de charrue puis garçon brasseur son père y devient cultivateur tandis que son épouse s’occupe du café-cabaret à l’enseigne du Cambrinus .

Age adulte et formation militaire

A 20 ans en 1909 lors du recencement militaire c’est un jeune homme d’un mètre 74 aux cheveux châtains et aux yeux bleus. Il a dû fréquenter l’école communale du village puisqu’on lui attribue le niveau 3 concernant l’instruction générale, il savait lire écrire et compter et dans la famille c’était si important qu’on lui avait fait faire un petit meuble sur lequel il rédigeait les courriers nécessaires et dans lequel il rangeait soigneusement les papiers importants de la ferme et du cabaret.

Son feuillet matricule nous apprend encore que pour son service militaire (classe 1909) il a été incorporé au 2ème régiment d’Artillerie Coloniale à Brest le 5 octobre 1910 mais qu’il a été réformé (n°2) le 9 novembre 1910 pour bronchite spécifique .

Lors du recencement de population de 1911 Séraphin a 22 ans et il est agriculteur dans la petite ferme de Wolphus à Zouafques dans laquelle ses parents sont venus s’installer après en avoir fait l'acquisition en 1891. Il semble aider son père à la ferme avec son frère ainé et sa sœur Berthe. Ses sœurs Louise et Aline sont sans doute déjà partie à la ville « pour y servir » comme domestique et sa jeune sœur Léa fait de la couture .

L’entrée en guerre

Lors de la déclaration de guerre en 1914 il a 25 ans et son père est déjà malade, il décèdera d'ailleurs le 27 novembre 1914.Pendant quelques mois il pourra néanmoins rester à la ferme pour aider sa mère devenue veuve bénéficiant de sa réforme pour raison de santé mais bientôt début 1915 les évènements se précipitent, en mars 1915 il apprend que son frère Louis est décédé dans un hôpital complémentaire de Valmy près de Sainte-Menehould des suites d’une affection pulmonaire contractée au front. Etait-il déjà lui-même en route pour la guerre ? Sa mère et sa sœur Léa iront seule à Sainte Menehould assister à une cérémonie militaire en l’honneur de cet enfant et frère ainé Mort pour la France . Début 1915 [3]on le rappelle au conseil de révision d’Ardres et il est reclassé services auxiliaires pour participer à sa manière à l’effort de guerre. Mais la décision n’est pas entérinée par la commission de réforme d’Angoulême et il est reclassé service armé et affecté au 165ème Régiment d’Infanterie. Il doit abandonner sa mère et ses sœurs qui devront seules s’occuper de la ferme . Alors qu’il vient de perdre son frère il doit partir rejoindre son régiment où il arrive le 22 avril 1915. Il passe au 8ème Régiment d’Infanterie puis au 33ème Régiment d’Infanterie le 24 août 1915, c’est dans ce dernier régiment qu’il va se battre jusqu’à sa disparition en 1916.

Le 33e Régiment d’Infanterie dans la guerre 14-18

Disparition au combat

Sa fiche (Mémoire des Hommes ) indique simplement : Mort pour la France le 2 mars 1916 à Douaumont (Meuse) Disparu au combat . La fiche matricule ajoute simplement que le décès a été fixé au 2 mars 1916 à Douaumont par jugement déclaratif rendu par le tribunal de St Omer en date du 12 novembre 1920. Ce jugement a été transcrit pour servir d’acte de décès à Zouafques le 16 décembre 1920.

L’attente de la famille

A peine un an après le décès du fils aîné Louis à Valmy-Sainte-Menehould toute la famille Ducrocq Roger allait vivre à nouveau des mois d’angoisse, le plus jeune fils parti lui aussi au front ne donnait plus de nouvelles. Il est d’abord réputé disparu dans les durs combats du 2 mars 1916 mais on espère encore un courrier s’il avait eu la chance d’être fait prisonnier ... C’est ce type de courrier début avril 1916 émanant de l’autorité militaire [4]qui maintient tout de même l’espoir et prépare au pire : «Madame, J'ai le regret de vous dire que le soldat dont vous me donnez le nom par votre lettre du 9 courant est disparu le 2 mars. Mais comme il est probable que les soldats étant dans ce cas, le 2 mars, à l'endroit dont il s'agit, sont prisonniers pour la majorité, je suppose que vous ne tarderez pas à avoir des nouvelles d'Allemagne. Je vous souhaite, sans pouvoir, bien entendu, vous donner des assurances formelles à ce sujet. Je ne puis vous dire autre chose, et vous envoie; Madame, avec tous mes regrets les plus sincères mes meilleures salutations Le capitaine (illisible) Y. Penson (?) »

Mais les mois passent et finalement il faut se rendre à l’insupportable évidence : le soldat de 2ème classe Théodore Séraphin Ducrocq est mort pour la France « disparu au combat ». La date probable est le 2 mars 1916. En fin d’année 1916, le 28 mars la famille fera dire dans l’église de Zouafques une messe en mémoire de ses deux seuls fils Louis et Théodore Séraphin qu’elle a donnés à la France.

Ce n’est que l’année suivante , le 1er mars 1917 que la famille aura quelques détails sur la fin de Théodore Séraphin, c’est un de ses camarades, le soldat Bonnet qui écrit : « 1er mars 1917 de Lezoux (Puy-de-Dôme) Madame Ducrocq, Mon fils prisonnier au camp de Hameln, à qui vous avez écrit, me charge d'une bien pénible corvée auprès de la mère de son cher ami Théodore. Votre glorieux fils est mort pour la France il y aura un an demain. Puisque mon fils me dit de vous faire connaître toute la vérité, je ne puis que vous transcrire textuellement son écrit : J'ai reçu une lettre de Madame Veuve Ducrocq Roger à Zouafques par la Recousse (Pas-de-Calais) pour avoir des nouvelles de son fils Théodore, mon ami de la 7e escouade. Je ne l'ai pas vu mort, mais j'ai appris qu'il avait été écrasé avec toute l'escouade dans leur abri le 2 mars à Douaumont. Ce malheureux est juste rentré de permission pour se faire tuer. Soyez assez bon, chers parents, de répondre pour moi qui ne puis le faire. La vérité sera bien cruelle mais l'incertitude ne vaut guère mieux. Malheureusement, la mère de mon ami n'est pas seule dans le deuil. Car, ce que je ne vous avais jamais dit, sur 183 de la 9e compagnie il y eut 153 tués à Douaumont, 29 prisonniers et un, le sergent Bouclé, qui réussit à passer à l'arrière. Voilà, Madame tout ce que mon fils me dit concernant le vôtre. Il est bien malheureux et nous demande toujours des vivres, des effets ... Ma femme et moi prenons part à votre grande peine et nous inclinons bien bas devant la mémoire de votre cher fils. Recevez Madame mes bien respectueuses salutations Votre tout dévoué A.Bonnet Bonnet Antoine, Mal des Logis de gendarmerie rappelé à Lezoux » .

Le corps de Théodore Séraphin Ducrocq a néanmoins été retrouvé plus tard puisque Léa Ducrocq a toujours dit qu'il était enterré avec un camarade de combat sous une croix au cimetière de Douaumont ; peut-être n'avait-on pas été capable de séparer les deux corps écrasés sous l'abri . Elle conservait d'ailleurs précieusement le numéro de cette croix au dos d'une minuscule enveloppe...

Documents

Lettre du 14 avril 1916

Transcription :

Madame, J'ai le regret de vous dire que le soldat dont vous me donnez le nom par votre lettre du 9 courant est disparu le 2 mars. Mais comme il est probable que les soldats étant dans ce cas, le 2 mars, à l'endroit dont il s'agit, sont prisonniers pour la majorité, je suppose que vous ne tarderez pas à avoir des nouvelles d'Allemagne. Je vous souhaite, sans pouvoir, bien entendu, vous donner des assurances formelles à ce sujet. Je ne puis vous dire autre chose, et vous envoie; Madame, avec tous mes regrets les plus sincères mes meilleures salutations Le capitaine (illisible) Y. Penson (?)

Témoignage d'un camarade de régiment sur les circonstances de son décès (mars 1917)

Par lettre en date du 1er mars 1917, Antoine Bonnet (père d'un camarade de régiment de Théodore, lequel camarade était alors prisonnier de guerre) adresse un témoignage de son fils pour la mère de Théodore Ducrocq sur les circonstances de la mort de Théodore :

Transcription de la lettre du 1er mars 1917 :

« 1er mars 1917 de Lezoux (Puy-de-Dôme)

Madame Ducrocq, Mon fils prisonnier au camp de Hameln, à qui vous avez écrit, me charge d'une bien pénible corvée auprès de la mère de son cher ami Théodore.

Votre glorieux fils est mort pour la France il y aura un an demain. Puisque mon fils me dit de vous faire connaître toute la vérité, je ne puis que vous transcrire textuellement son écrit : J'ai reçu une lettre de Madame Veuve Ducrocq Roger à Zouafques par la Recousse (Pas-de-Calais) pour avoir des nouvelles de son fils Théodore, mon ami de la 7e escouade. Je ne l'ai pas vu mort, mais j'ai appris qu'il avait été écrasé avec toute l'escouade dans leur abri le 2 mars à Douaumont. Ce malheureux est juste rentré de permission pour se faire tuer. Soyez assez bon, chers parents, de répondre pour moi qui ne puis le faire. La vérité sera bien cruelle mais l'incertitude ne vaut guère mieux. Malheureusement, la mère de mon ami n'est pas seule dans le deuil. Car, ce que je ne vous avais jamais dit, sur 183 de la 9e compagnie il y eut 153 tués à Douaumont, 29 prisonniers et un, le sergent Bouclé, qui réussit à passer à l'arrière.

Voilà, Madame tout ce que mon fils me dit concernant le vôtre. Il est bien malheureux et nous demande toujours des vivres, des effets ... Ma femme et moi prenons part à votre grande peine et nous inclinons bien bas devant la mémoire de votre cher fils. Recevez Madame mes bien respectueuses salutations Votre tout dévoué A.Bonnet

Bonnet Antoine, Mal des Logis de gendarmerie rappelé à Lezoux »

Documents divers

Lien interne

Sources

Notes

  1. Alice qui s’est mariée plus tard avec Augustin Darcheville et Marie qui s’est mariée à Louis Biset
  2. sans compter ses deux demi-sœurs qui semblent avoir été élevées ailleurs
  3. la chronologie des faits est difficile à établir, quelques dates sont illisibles sur son feuillet matricule
  4. 4 avril 1916, lettre de l'armée à Madame Ducrocq-Roger (de Zouafques) lui annonçant la disparition de son fils Théodore
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