Monument à la division Barbot

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Monument à la division Barbot
Souchez Barbot statue.jpg
Localisation Souchez, En bordure de la route départementale 937 Arras-Béthune, face au cimetière communal
Conflits commémorés 1914-1918
Sculpteur Jules Déchin
Épitaphe Aux morts de la 77e DI tombés sur le sol d'Artois du 1er octobre 1914 au 20 février 1916...

Texte de l'épitaphe

Sous la statue du général Barbot sont inscrits ces deux textes de part et d’autres du socle :

« Aux morts de la 77e DI tombés sur le sol d'Artois du 1er octobre 1914 au 20 février 1916

À la haute mémoire du Général Barbot commandant la 77e DI tombé devant Souchez le 10 mai 1915 »


Sur la droite du monument :

« Gal [général] Stirn 1871-1915 – 1914 Alsace, la Chipotte, Arras – 1915 Souchez – 1916 Verdun, la Somme – 1917 Chemin des Dames – 1918 Picardie, Marne, Flandres »

Sur la gauche du monument :

« Gal [général] Plessier 1856-1914 – 17e, 54e, 56e, 57e, 60e, 51e Bataillons de Chasseurs – 97e, 159e Régiments d'infanterie Alpine – 6e régiment d'artillerie – Compagnies 14-13, 14-63 du Génie »

Les auteurs

Sculpteur : Jules Déchin (le père de l'architecte Paul Déchin), Grand Prix de Rome.

Architecte : Paul Déchin, Diplômé par le Gouvernement

Maître d'œuvre : Entreprise Canler

Descriptif

Au premier plan, une statue en bronze du général Barbot (revêtu de sa capote de soldat, une main portée entre deux boutons comme à son habitude) semble protéger ses soldats d’un geste de sa main alors que ceux-ci s'apprêtent à sortir des tranchées. Sur les côtés du monument deux médaillons représentent le général Plessier (commandant de la 77e division d'infanterie avant Barbot, mortellement blessé en Alsace le 19 août 1914, premier général tombé à l'ennemi de cette guerre) et le général Stirn (successeur immédiat de Barbot, tué le surlendemain dans le même secteur). Le monument est dominé par une statue ailée de la victoire levant au ciel des lauriers.

Inauguration

Dimanche 9 mai 1937, en présence de nombreuses personnalités.

Le journal le Réveil du Nord rapporte l'inauguration du monument Barbot dans son édition du 10 mai 1937 :

« Le général Barbot et ses poilus héroïques de la 77e division alpine ont été glorifiés hier à Souchez ou un monument à leur mémoire a été inauguré

La cérémonie d'inauguration du monument élevé près du cimetière de Souchez à la mémoire du général-soldat Barbot et de ses vaillantes troupes alpines de la 77e division, s'est déroulée sous un ciel gris et brumeux en présence de nombreuses personnalités civiles et militaires et de milliers d’anciens combattants de la grande guerre.

Le matin, au cimetière national de Lorette, enseveli sous un immense suaire de brume, la confédération départementale des anciens combattants qui groupe près de 100 000 membres s'était rendue en pèlerinage annuel sur les tombes des 35 000 morts de la nécropole militaire. Répondant à l'appel émouvant du secrétaire de la confédération des anciens combattants, des milliers d'anciens poilus entourant des centaines de drapeaux étaient venus se recueillir avec leurs enfants sur cette colline sacrée où tant de vies humaines ont été immolées par cet horrible crime qu'est la guerre, selon les termes de l'appel lancé par un grand mutilé de la face, vénéré des anciens combattants, M. Abel Fruchart.

Après ce nouveau pèlerinage pieusement accompli, les anciens combattants à la tête desquels marchaient leurs dirigeants se rendirent à Souchez pour assister à la cérémonie d'inauguration du monument Barbot.

Le maréchal Pétain qui avait accepté la présidence de cette cérémonie n'ayant pu, pour raison de santé, tenir sa promesse, se fit représenter par le général Keller, chef de son état-major.

Arrivés le matin en gare d'Arras, les nombreux généraux et les personnalités civiles et militaires se rendirent sur la tombe du général Barbot, passant sous une voûte de soie tricolore confectionnée de centaines de drapeaux de sections d'anciens combattants. Là, les personnalités se recueillirent et un prêtre catholique, l'abbé Lefebvre, ancien aumônier de la 77e division, et un pasteur protestant, M. Pannier, aumônier, récitèrent des prières et des psaumes. Une messe fut dite ensuite à la chapelle, puis les personnalités gagnèrent Souchez pour assister à un déjeuner intime.

À 15 h 30, les abords de la statue du général Barbot sont occupés par des milliers et des milliers de spectateurs parmi lesquels, en majorité des anciens combattants. Le service d'ordre est assuré par M. Rosset, commissaire spécial. Les centaines de drapeaux font derrière le monument une haie tricolore. Devant la statue enveloppée d'une soie bleu, blanc, rouge, les dirigeants de la confédération des anciens combattants sont là, l'un d'eux tient la petite croix de bois sur laquelle on peut lire : Ernest Barbot, général de la 77e division, mort pour la France. Il y a là également, les drapeaux régimentaires du 159e, du 97e et celui usé jusqu'à la corde du glorieux régiment arrageois du 33e.

La foule vibre d'enthousiasme et on la sent sous le coup d'une émotion qui va croissante. Un groupe important de l'association du 56e bataillon de chasseurs avec M. Hauel est présent avec son fanion jaune et bleu ; les anciens de Barbot, les Chamois et les Grelus qui, en 1915, montèrent à l'attaque du Cabaret rouge n'ont pas manqué d'être près de leur glorieux général qui vit toujours dans leur cœur. Il y a là toutes les vaillantes troupes dauphinoises venues rendre un intime hommage à celui qui, vêtu d'une capote de soldat, coiffé du légendaire béret alpin, était pour elles un symbole de courage et d’héroïsme.

Voici les personnalités. Elles gagnent la tribune d'honneur. On note au passage M. le général Leroy, commandant la 1ère région, représentant le Président de la République ; M. Rochard, préfet du Pas-de-Calais, représentant le Président du Conseil et M. Le Président de la Chambre des députés ; M. le général Prételat, représentant M. le ministre de la Guerre ; M. le général Antoinat, représentant M. le ministre de l’Air ; l'intendant-général Vincensini, représentant M. le ministre des Pensions ; M. Châtelet, directeur général de l'enseignement du second degré, représentant M. le ministre de l'Éducation nationale ; M. Georges Lecomte, membre de l'Académie Française qui eut son fils tué à Carency le 9 mai 1915 ; les généraux Demetz, Modacq, de Serrigny, Cartier, le colonel de gendarmerie Léguillette, de Lille ; le commandant Éloy, les capitaines Ducongé et Jérome ; les colonels Keller, Humbert, Farjon, vice-président du Sénat ; MM. Lefebvre du Prey, ancien ministre, sénateur ; [Monseigneur] Dutoit, évêque d'Arras ; Théry, secrétaire général de la préfecture ; Douay, chef de cabinet du préfet ; Janacek, représentant le ministre tchécoslovaque ; les docteurs Hufnaghel, Brateck, des anciens combattants tchécoslovaques ; Déchin, statuaire, auteur du magnifique monument ; Mmes les générales Plessier et Stirn ; Mgr Sergent ; le docteur Patou, de l'UF [Union fédérale] ; Fontenaille de la FIDAC ; Devillers, président département de l'UNC ; Abel Fruchart, président départemental de l'UF ; Auléry, chef de zone au ministère des Pensions ; le colonel britannique Higginson ; les colonels Thounon, du 3e Génie ; Michet de la Baune, du 159e ; José Germain, président des écrivains anciens combattants ; Pruvost, maire de Souchez ; Lancino, maire d'Ablain-Saint-Nazaire ; les directeurs des mines de la région ; Umbricht, aumônier de la place de Strasbourg ; le docteur Poiteau, des écrivains combattants ; Veil Durand, conseiller d'État ; le vicaire général du comité de Lorette, etc.

L'instant est solennel. L'émotion est intense. Des anciens de Barbot pris de syncope tombent sur la route et des gendarmes transformés en brancardiers transportent les malades à l’ambulance du 3e Génie. L'hymne national retentit alors que les drapeaux s'inclinent et que les têtes se découvrent. Un silence poignant règne sur ce coin sanglant des anciens champs de tuerie.

L'harmonie des mines de Liévin exécute des Allobroges et la chorale de Liévin chante ce chant célèbre.

M. Pruvost, maire de Souchez, devant le micro va prononcer un bref discours où il dit toute sa reconnaissance, lui, ancien de la division Barbot, pour son chef et pour ses vaillants soldats. Le général Keller lui succède pour lire le discours que devait prononcer le maréchal Pétain. Ces premiers mots seront pour remercier les organisateurs : MM. Petit, Cresson et Danchin. Et c'est ensuite l’admirable page d’histoire de la 77e division constituée en pleine bataille de la Mortage, sous le commandant du colonel Barbot avec les troupes des unités de montagne, unités d'élites que l'on trouvera partout sur le front au plus fort des combats et toujours à l’honneur. C'est la journée du 9 mai 1915 : le Cabaret Rouge, le cimetière de Souchez, la crête de Vimy. « La percée est faite. Pour la 77e division c'est la victoire tactique aussi complète qu'elle pouvait l'espérer, mais ce n'est pas la victoire stratégique ».

Et voici le 10 mai « la division est cruellement atteinte dans son chef : le général Barbot est frappé à mort ».

« Comment expliquer l'énorme prestige que s'était acquis le général Barbot dans le commandement de sa division ? » Voici : « Grand maigre, vêtu d'une capote de simple soldat, coiffé d’un béret alpin, on le trouvait partout où sa présence était nécessaire. Son regard profond et bon exprimait une foi communicative. Chacun comprenait en l'approchant que cet homme vivait les heures pour lesquelles il s’était préparé. Le jour de sa prise de commandement au col de la Chipotte, chargé de protéger le repli de l'armée d'Alsace, on dirait qu'il la couvre de son corps. Fin octobre, alors qu'Arras semble perdu, il refuse de l'abandonner et la ville est sauvée ».

Le général Barbot savait causer avec les hommes, il savait exalter leur courage et sa simplicité d’attitude, bien loin de diminuer son prestige, engendrait une communauté de pensées qui réunit dans une même affection des hommes qui poursuivent le même but et sont exposés aux mêmes dangers ».

Le maréchal Pétain, dans son discours, donne aux chefs de l’armée de profonds conseil car, dit-il, « il appartient d'abord aux chefs subalternes, chefs de section et capitaines se s'imposer à leurs hommes par l'exemple constant des vertus militaires. De la fermeté de leur attitude, de leur habilité professionnelles, de leurs initiatives en face des situations toujours nouvelles, dépend le sort de l'action ». Et il ajoute : « Prêt à sacrifier sa vie, le soldat a le droit d’exiger qu'il en soit fait bon usage ».

Enfin, pour terminer, le maréchal Pétain parle du problème de la confiance : « Ce problème de la confiance dépasse d'ailleurs le cadre militaire. Il est de tous les temps, de tous les pays, de toutes les collectivités où s'affrontent des intérêts divergents, où des hommes ont la charge de disposer du destin ou du sort matériel de milliers d’autres. Qu'elle qu’en soit la forme, sa solution se trouve dans l’appréciation exacte par les chefs des possibilités humaines, dans leur sollicitude à l'égard des plus humbles, dans la protection des collectivités qu'ils dirigent contre les théories subversives et destructrices ».

D’un gente lent, le général Keller enlève le voile qui couvre le monument et le général-soldat apparaît, tout en bronze, comme guidant ses hommes qu'il aimait tant et qui le vénéraient. Après cette cérémonie, des fanions ont été remis pour le maréchal Pétain et à Mme Morillon, nièce du général Barbot, et à Mme Stirn, femme du général Stirn, qui fut tué également à la tête de la 77e division alpine.

Les troupes du 3e Génie, musique en tête et drapeau, ont ensuite défilé au milieu d'applaudissements enthousiastes devant la statue de celui qu’on appelle « le Bayard de la Grande Guerre. »


Galerie de photographies

Sources