Paul Baude

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Paul Baude à bord de son coucou, route de Saint-Omer à Fauquembergues, devant la maison et le garage familial
Paul Baude posant devant son coucou au même endroit

Paul Baude fut une figure locale bien connue dans l'Audomarois, pour avoir fait faire des baptêmes de l'air aux locaux à bord de son Pou du ciel.

Sa jeunesse

Né en 1894, près de Lumbres, émule d’Icare, Paul Baude tente, enfant, un saut depuis la toiture de la maison familiale qui s'achève dans la boue mais dont il sort indemne, ce qui va l'encourager dans sa passion : l'aviation naissante. Après de courtes études, il travaille chez un constructeur d'avions de Saint-Omer. Ce dernier quitte notre région en 1908 pour réaliser un hydravion. Paul se trouve pendant la Première Guerre mondiale, incorporé à l'armée d'Orient. Il y rencontre une autre figure locale : l'abbé Nestor Delétoille, futur curé de sept paroisses, notamment d'Azincourt, philanthrope, grand collectionneur, et grand voyageur. Après la défaite des Dardanelles, Paul suit les forces alliées avec son chef, le général Denain, dans les Balkans. C'est là qu'il rencontre Coste et Bellonte, pionniers de l'aviation qui réussiront la traversée de l'Atlantique en 1930, ralliant Paris et New-York.

Sa vie professionnelle : garagiste aviateur

Après la guerre, dans les années 1920, il s'installe comme garagiste à Fauquembergues. Il s'y fait très rapidement une bonne réputation, décelant la panne au son du moteur, apprécié pour sa jovialité et pour ne pas grever le budget de ses clients qui le surnommaient « Fil de fer ». Il se porte acquéreur de la première voiture à Fauquembergues. Pour satisfaire son envie de voler, il fixe son choix sur un planeur qu’il fabrique lui-même dans son atelier. Il mobilise tout son voisinage pour son nouveau-né, une cinquantaine de personnes, mais ses essais restent infructueux. Il se rend alors aux Domaines à Paris et fait l'acquisition d'un monoplan. Pour éviter une seconde déconvenue, il fait venir un pilote, construit un hangar dans une pâture pour remiser son avion, et organise les premiers baptêmes de l’air sur la route d’Audincthun, près du lieu-dit de la Forêt. Ces vols deviennent une grande attraction pour la jeunesse et les habitants des environs. Mais le nouvel arrivé ayant réussi à lui briser sa voiture (une Renault BZ) au cours d'un vol de nuit, il le licencie sur le champ. En 1931, le hangar est réinstallé sur les côtes d'Assonval. La réputation de Paul Baude dépasse dès lors le canton, pour gagner le Haut-Pays d'Artois et Saint-Omer. Son coucou trouble la quiétude des villages, incommodant davantage les adultes que les enfants qui au cours des repas quittent la table pour scruter l'engin un peu mystérieux.

La Seconde Guerre mondiale

Lorsque arrive la Seconde Guerre mondiale, Paul Baude doit se séparer de son appareil qui est réquisitionné. Il poursuit son travail de mécanicien, mettant son ingéniosité au service des agriculteurs de Renty, en transformant plusieurs châssis de Citroën en mini tracteurs. En mai 1941, il fait partie à Renty, d'une curieuse association "nautique", celle des « Deux gaules » qui regroupe une quinzaine de jeunes, avec une chambre à air pour bouée. Ils sont encadrés par Norbert Fillerin, résistant, Paul Baude, Georges Clabaut, l'abbé Perrin, et le parrain de Gabriel Fillerin (fils du précédent), en réalité un aviateur allié réfugié chez les Fillerin.

L'aventure du Pou du Ciel

En 1946, il se remet à l'œuvre pour tenter de construire un engin volant et transforme sa maison en atelier. Il rassemble plusieurs pièces, y met tout son savoir et presque tout son avoir, comptant plus sur son ingéniosité que sur ses moyens financiers. La construction de sa "moto volante" donne lieu à quelques épisodes épiques imprimés dans la mémoire des Fauquemberguois. À l'étape de l'assemblage, la carlingue doit passer par l’escalier, et pour que les ailes sortent sans encombre, il faut enlever quelques tuiles. Mais il est satisfait : il peut décoller sur 50 mètres et il lui en faut à peine 100 pour atterrir, ce malgré son faible moteur, avec les deux cylindres de moto opposés. Son zinc qui lui aura coûté environ 50.000 francs à l'époque, lui valurent le succès et la notoriété. Survoler la région, était pour lui d’une facilité surprenante, « pas besoin de terrain, une pâture … ».

De son atelier sortent ensuite deux Poux du Ciel. Son terrain se trouve alors sur des terres incultes à proximité du chemin des Charbonniers. Ses décollages lui réservent parfois des surprises comme ce jour où une descente trop rapide lui brise son hélice. Lorsqu'il rentre, il démonte les ailes de son avion, les fixe sur un support à roues, le tout tiré par sa voiture.

La fin d'un rêve

En 1965, l’aviation civile devient pressante, vis-à-vis de ce « squatter du ciel », qui vole sans permis. Il est forcé de conduire son avion sur le terrain d'aviation des Bruyères à Saint-Omer, par voie de terre, naturellement. Devenu un aviateur chevronné, sa réputation avait gagné la capitale, et il n'était pas rare de le retrouver dans la presse ou sur le petit écran, devisant aux côtés de son « Pou du Ciel ».

Quand vint l'heure de son inhumation, un groupe d’aviateurs et son petit-neveu, Louis Noël, survolèrent la vallée de l'Aa, formant un mouvement de roulis dans le ciel, signe d'adieu, tandis qu'était jetée une gerbe de fleurs au-dessus du cimetière de Fauquembergues, derniers hommages rendus à Paul.

Galerie photos

Sources et Bibliographie

  • Mémoire familiale recueillie par Pierre Bellenguez
  • Pierre Bellenguez, « La hardiesse et l'ingéniosité de notre aviateur local : Paul Baude », Bulletin historique du Haut-Pays n° 59-60, Comité d'histoire du Haut-Pays 2000.